Acte premier

Scènes 1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9 | 10





Site pittoresque. Des rochers. Un lac. Une chaumière. Au fond, dans le lontain, le château de Douglas.



Scène première
Le jour commence à poindre. Des soldats blessés et des montagnards, dernier débris de l’armée écossaise, sont groupés ça et là;
ils attend en silence, et regardent au loin avec anxiété. Roberto Bruce paraît sur un sentier éléve, dans les rochers.
Les Écossais, l’apercevant, s’écrient avec joie:


Les Écoissais
(allant au-devant de Bruce, qui a descendu le chemin pratiqué dans les rochers)
Robert! Robert! – mille angoisses mortelles
Déjà nous avaient assaillis,
Enfin, nous voilà réunis!

Bruce
De notre Écosse amis fidèles,
Demain vos maux seront finis.

Les Écoissais
(avec découragement)
Hélas! plus d’espérance!
Du ciel c’est le courroux!
Après tant de souffrance
L’espoir fuit loin de nous.

Bruce
Quoi! renoncer à la vengeance,
Quand Robert Bruce est avec vous!

Les Écoissais
Sans toit, sans pain et sans patrie,
Errant, vaincus, proscrits,
La foi dans notre âme est taire,
Le ciel nous a maudits!


AIR

Bruce
Eh quoi! chez vous, la crainte!
Chez vous, l’effroi, la plainte!
La flamme est-elle éteinte
Déjà dans tout les c
œurs
Brisés par les douleurs?

Jette sur leur souffrance
Un regard de clémence,
O divin protecteur!

Viens rendre à leur vaillance,
La force et la constance!
L’Écosse à ta puissance
Devra la gloire et la bonheur.

Un soldat
(signalant Douglas qu’il voit s’avancer)
Douglas!

Bruce
(avec joie)
Douglas!



Scène deuxième
Les précédents, Douglas, entrant avec quelques guerriers


Douglas
Prêts pour la guerre,
Nous voici tous!
Sous ta bannière,
Roi! guide-nous!

(Bruce serre la main de Douglas et le montre comme un exemple à ses soldats, qui, ranimés, s’écrient avec lui.)

Sous ta bannière
Roi! guide-nous.


ALLEGRO DE L’AIR


Bruce
Pour de nouveaux combats
Viens, peuple, armer ton bras!
Viens, las de tes revers
Briser tes fers!

J’entends, patrie,
Ta voix chérie;
Elle me crie:
Sois mon sauveur!
Ou martyr ou vainqueur!

Douglas
A ma chérie Marie, à ma fille, j’espère,
Mon message parviendra.
Une barque au château bientôt nous conduira;
Goûtons-y quelques jours un repos nécessaire.

Bruce
Et de l’Écosse après, relevons l’éntendard.

(On entend une fanfare dans la lointain.)
Douglas

Quel est ce bruit?

Les Écossais
Quel danger nous menace?
Ce sont eux! les Anglais!

Douglas
(écoutant)
Des fanfares de chasse!

Bruce
L’insolent Édouard!
Sa victoire l’enivre,
Au plaisir il se livre.

Douglas
Dispersons-nous, sans retard.
Vous, sire, attendez la nacelle
Avec moi, chez Dickson, un serviteur fidèle.
(aux Écoissais)
Vous, gagnez l’autre bord, dans peu nous y serons.

Bruce
Dieu vous garde! – A bientôt, mes nobles compagnons.

(Les partisans de Bruce se disperdent dans les rochers. Bruce et Douglas entrent dans la chaumière. Le bruit de la fanfare s’est rapproché de plus en plus.)



Scène troisième
Arthur, Morton et des chevaliers anglais


Les chevaliers
(applant avec inquiétude)
Lancastre! Lancastre! – où peut être
Le roi notre maître?
Loin de la chasse,
Perdre sa trace!
Par son audace
Nous désoler!

Seul, il s’élance,
Il nous devance,
Son imprudence
Nous fait trembler.

Pour notre maître,
Ah! craignons tout.
Bruce est peut-être
Encor debout.

Morton
Non, sa défaite
Fut trop complète
Pour son parti.

Quelques chevaliers
Par cette querre,
Il est, j’espère,
Anéanti.

Arthur
J’ai l’assurance
Que pour la France
Bruce est parti.

Tous
Au loin, sans doute,
Chasse Édouard;
Mais je redoute
Le montagnard.

Dieu, que je prie,
Garde le roi,
Sauve sa vie,
Vois notre effroi.

Que dans l’espace
Sonne le cor;
Nous, vite en chasse,
Chercherons encor!

(Morton s’éloigne avec les chevaliers)



Scène quatrième
Arthur, resté seul


Arthur
Marie! à ce doux nom comme mon c
œur palpite!
Le voilà donc le château qu’elle habite!
Ce lac dont les échos redisaient autrefois
Ces chant d’amour où se mêlait ma voix!
Quand je combats pour le roi d’Angleterre,
Comblé de ses faveurs, par lui fait chevalier,
Marie, hélas! je ne suis pour ton père
Qu’un ennemi que tu dois oublier.
Esclave de l’honneur, mais à l’amour fidèle d’elle.
(il s’éloigne tristement)

(Un barque paraît sur le lac; elle porte Marie et Nelly. Elles abordent, Nelly entre dans la cabane de Dickson, sur un signe de Marie.)




Scène cinquième
Marie, seule


CAVATINE

Marie
Calme et pensive plage,
Beau lac, miroir des cieux,
Rocher, désert sauvage,
Témoin de nos adieux!

Tout ici me rappelle
Les jours de mon bonheur;
Rêve fidèle!
Bercez mon triste c
œur!

Amour! ô sainte flamme!
Que Dieu davait bénir,
Croyance de mon âme,
Pourrais-je te bannir?

Tout ici me rappelle
Les jours de mon bonheur;
Rêve fidèle!
Bercez mon triste c
œur!



Scène sixième
Marie, Arthur


Marie
(avec un élan de joie, à la vue d’Arthur)
Arthur!

Arthur
(avec amour)
Marie!

Marie
(à part, avec un effroi subit)
O ciel!

Arthur
Est-ce moi qui fais naître
Votre effroi?

Marie
(à part, inquiète)
Si mon père...

Arthur
Ah! cet accueil glacé...
Faut-il donc croire, hélas! ce qui m’est annoncé,
Qu’un autre hymen... un autre amour peut-etre!...

Marie
Et c’est vous qui doutez de moi,
Vous pour qui la main de Marie
Eut moins de prix que la faveur d’un roi!

Arthur
Non, j’obéis aux lois de la chevalerie.
Combattant par devoir dans les rangs des Anglais.

Marie
Vous rendez notre hymen impossible à jamais.


DUO

Arthur
Moi te perdre! arrêt funeste!
Seul au monde, hélas! je reste.

Marie
Vaine plainte! amor funeste!
Vains regrets! le deuil me reste.

Marie et Arthur
C’en est fait! le sort enlève
Tout espoir à notre amour.
De mon âme le doux rêve
M’abbandonne sans retour.

(Une cloche sonne au loin et l’on entend un chœur de jeunes filles.)

Chœur
A la prière
Viens ce matin,
Peuple; révère
Saint Valentin!

C’est lui qui donne
Les jours hereux,
Lui qui pardonne
Et prie aux cieux.

Marie
Entendez-vous?

Arthur
De la chapelle
C’est la cloche.

Marie
Je me rappelle...
Une fête... séparons-nous.

Arthur
Un seul instant daigne m’entendre!

Marie
Ici mon père doit se rendre...

Arthur
Par grâce!

Marie
Il pourrait nous surprendre.
Craignez son courroux,
Éloignez-vous! éloignez-vous.

Arthur
Fermer ton âme à ma prière!
De ta présence, hélas! toi me bannir!

Marie
Au nom du ciel! je crains mon père,
A chaque instant il peut venir.

Arthur
Sa haine désole ma vie.

Marie
C’est toi-même qui l’as flétrie!
L’espérance nous est ravie.

Arthur
Je ne puis vivre sans te voir.

Marie
L’amour doit céder au devoir.


ENSEMBLE

Marie
Va! d’un père,
Fuis la colère!
Tout sur la terre,
Oui, tout nous a menti.
A ma misère
Son âme altière
N’a jamais compati.

Arthur
Va! d’un père,
Crains la colère!
Tout sur la terre,
Oui, tout m’aura menti.
A ma misère
Son âme altière
N’a jamais compati.


Scène septième
Marie, Arthur, Douglas, Bruce, caché sous le tartan d’un montagnard.


Douglas
(sortant de la chaumière)
Ciel!

Bruce
(voyant Arthur)
Un anglais!

Douglas
Arthur!
(à Bruce)
Il ne vous connaît pas,
Sous le nom de Dickson, sire! suivez mes pas.

Arthur
(apercevant Douglas)
Douglas!

Marie
Mon père! ah! ce regard sévère
Sur moi peut tomber sans colère.
(montrant Arthur)
Le hasard seul l’a conduit en ce lieu.

Arthur
Pour entendre un dernier adieu.

Douglas
(à Arthur)
Elle t’amait; d’une heureuse alliance
J’avais longtemps moi-même approuvé l’espérance;
Mais tu viens de la voir pour la dernier fois.
Seul digne d’elle, au sein de sa patrie,
Un autre hymen attend Marie.
D’un autre époux pour elle j’ai fait choix.

Arthur
Mais d’Édouard, tout subit la puissance,
Et si Robert, par le nombre vaincu,
Avec la paix nous rendait l’espérance...

Douglas
Alors Douglas aurait vécu.

Marie
(à part)
Fatal honneur!

Douglas
Adieu! dis à ton maître
Que malgré nos revers, un jour... bientôt... peut-être,
An combat nous nous reverrons.
(à Bruce)
Et maintenant, Dickson, ta barque est là, partons.

(Bruce, Douglas et Marie montent dans la barque. Arthur fait quelques pas vers eux, puis s’éloigne avec désespoir. Nelly sort de la chaumière et suit des yeux la barque qui disparait. – On entend une ritournelle joyeuse. Nelly revient au-devant de Dickson, qui parait sur le seuil de la chaumière.)




Scène huitième
Nelly, Dickinson; jeunes filles et garçons du village
.


Nelly
Ce sont les clans de la montagne.
Chaque amoureux vient avec sa compagne
Célébrer ce matin
La fête de saint Valentin.

Les jeunes filles
La danse nous appelle,
Accours, amant fidèle;
Voici ce jour si doux,
Si beau pour nous.

Des filles du village
Accepte ici l’hommage,
Grand saint, bénis nos jeux,
Reçois nos v
œux!

Nelly
(à part)
D’où vient que la tristesse
Se mêle à mon ivresse?
Je songe à ma maîtresse,
Mon c
œur n’est plus joyeux.

Dickson
(à part)
Laissons à la jeunesse,
Les courts instants d’ivresse:
Trop tôt vient la tristesse,
Enfant, soyez heureux.

Les jeunes filles
La danse nous appelle,
Accours, amant fidèle;
Voici ce jour si doux,
Si beau pour nous.

Dickson
Que l’on ouvre la danse.

Nelly
Avant qu’elle commence,
De la Saint-Valentin,
Avec moi, mes amis, répétez le refrain.


COUPLETS

I
Alerte, fillette!
Celui qui te guette
Dans l’ombre discrète,
Attend sa conquète.

Le jour vient de naître,
Cours à ta fenêtre,
Si tu veux connaître
L’amant
Le plus aimant.

II
Il faut, ô ma belle,
Pour d’autres rebelle,
Voiler ta prunelle,
Et rester fidèle.

Car cette journée
A lui t’a donnée;
Il est pour l’année
Enfin
Ton Valentin.



DANSES



Scène neuvième
Les précédents, le roi Édouard, Arthur et toute la chasse



Édouard
Pourquoi cesser vos jeux? porquoi soudain vous taire?
Édouard d’Angleterre
N’est pas l’ennemi du plaisir.

AIR

La gloire est belle,
Mais j’aime mieux qu’elle
L’ivresse du plaisir.
Oui, j’aime l’ivresse
Qu’excite sans cesse
La flamme du désir.

Un jour, si le trône
M’est ôté,
Je veux pour couronne,
Volupté! Le lys dont se blasonne
Le sein de la beauté.

Arthur
(à part)
Douglas a disparu, je tremble pour sa tête.

Édouard
Pour vous, mes chevaliers, cette nuit, grande fête
au château de Stirling, où je fixe ma cour.

Dickson
(à part)
L’Ecosse aura son tour.



Scène dixième
Les précédents, Morton



FINAL


Morton
Sire! Douglas le Noir, dont le château s’élève
Sur l’autre bord du lac...

Édouard
Douglas le Noir! achève!

Morton
Douglas était ici ce matin.

Nelly, Arthur et Dickson
(à part)
Juste Dieu!

Édouard
(aux Écossais)
Est-il vrai? Répondez ou craignez ma colère!

(Tous gardent le silence)

Si vous persistez à vous taire,
Les tortures sauront m’obtenir un aveu.

Morton
Parlez, race indocile.

Édouard
De l’or, de l’or, à qui livre Douglas!

Dickson
Chez nous le sang ne se vend pas.

Édouard
Eh bien! la mort à qui lui donne asile.

Les Écossais
Mon Dieu! tu nous protégeras.

Édouard et Morton
Ah! pour lui point de clémence!
S’il me brave en sa démence,
Mon épée et ma vengeance
Lui feront subir ma loi.

Nelly, Dickson et Arthur
O céleste Providence,
Fais qu’il trompe sa vengeance,
Et mon âme espère en toi!

Édouard
(à Arthur)
Va! que ton zèle
Nous délivre du rebelle,
Aux créneaux de sa tourelle,
Que le traître soit pendu!

Arthur
(à part)
Ordre funeste! hélas! Dans ce péril que faire?

Édouard
Arthur! point de merci! va! tu m’as entendu!

Les Anglais
La guerre! La guerre!

Arthur
(à part)
Marie! hélas! comment sauver ton père?
Si j’hesite il périra.

Morton
Ah! sa perte enfin s’apprête.

Édouard
(à Arthur)
Va, rapporte-moi sa tête,
Ou la tienne en répondra.

Arthur
Je tremble, hélas! quel arrêt sanguinaire!
Me choisir, moi! pour servir sa colère!
Ah! prends pitié, mon Dieu! de ma misère!
Pauvre Marie!
Sur ta tête chérie
Je vois la mort.

Édouard
Mon bras sur toi va lancer le tonerre;
Le fer, le feu, les bourreaux et la guerre,
Tout va servir encore à ma colère.
Dans ma main j’ai ton sort,
Race maudite,
De qui l’orgueil m’irrite!
Á toi la mort!

Nelly, Dickson et les Écossais
Mon Dieu! punis l’oppresseur sanguinaire!
Ah! fais gronder sur son front le tonnerre!
De l’Écossais, mon Dieu, vois la misère;
Prends pitié de son sort.
Vois ses alarmes,
D’un peuple vois les larmes!
Veux-tu sa mort?

Morton et les Anglais
Du roi le bras va lancer le tonnerre.
Sur eux fondront tous les maux de la guerre.
Rien ne pourra désarmer sa colère.
Du vaincu c’est Le sort!
A lui les larmes!
Qu’il redoute nos armes;
A lui la mort!


2. Akt Zurück zu: Libretto

Atto secondo ritorna a libretto



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© DRG, 13. September 2001