Acte premier

Scène 1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9 | 10




Le théâtre représente une salle gothique ; des instrumens de guerre et de chasse sont suspendus aux murs.
On voit, dans le fond, une large fenêtre, et, à gauche, une vaste cheminée. Au lever de la toile, on entend gronder un orage.




Scène première
Cédric et ses vassaux sont à table. Un Pèlerin est assis près de la cheminée.



Cédric et Chœur
Saxons, la coupe en main
Au succès de nos armes !
Peut-être les alarmes
Vont renaître demain.

On frappe à la porte de la salle



Scène deuxième
Les précédens, Ismaël, Léila


Léila et Ismaël
Seigneur, dans votre demeure
Par pitié recevez-nous.

Chœur
Loin d’ici partez sur l’heure,
Ou craignez notre courroux.

Le Pèlerin
(à Léila)
Vite, vite, à cette place,
Sans bruit venez vous asseoir.

Léila
Ah ! seigneur, je vous rends grâce ;
Mon cœur renaît à l’espoir.

Chœur
Un musulman ! quelle audace !
Renonce à ce fol espoir.

Le Pèlerin
Méprisez leur insolence,
Je saurai vous protéger.

Léila
Sur notre reconnaissance
Comptez, ô digne étranger.

Le Pèlerin
Oui, malheur à qui menace
L’innocence et la beauté !

Léila
Quoi ! prés de vous prendre place !
Pèlerin, quelle bonté !
Ils sont à notre poursuite.

Ismaël
Sauvez-nous de leur fureur !

Chœur
Loin d’ici, race maudite !
Un musulman ! Quelle horreur !

Léila
Point de colère,
De mon vieux père,
À ma prière,
Calmez l’effroi.

Ismaël
Point de colère,
Ah ! d’un vieux père,
À sa prière,
Plaignez l’effroi.

Chœur
Vaine prière !
Vil temeraire
Crains ma colère,
Retire-toi.

Cédric
Non, sa priére
Ne peut déplaire ;
De son vieux père,
Je plains l’effroi.

Le Pèlerin
Votre prière
Ne peut déplaire ;
Cédric est père ;
Ah ! point d’effroi.

Léila et Ismaël
Excusez notre audace,
Seigneur, sauvez, de grâce,
Des fureurs d’un méchant
Un père et son enfant.

Chœur
Vaine prière !
Vil temeraire
Crains ma colère,
Retire-toi.

Cédric
Paix ! Mes dignes hôtes, lorsque la guerre est à nos portes, ne refusons l’hospitalité à personne. La trève conclue entre l’Angleterre et le roi de France, Philippe, expire demain ; et qui sait si alors nous aurons encore un asile ? Que ce musulman reste avec so fille, quoique sa présence éveille en mon âme des souvenirs douloureux... Je me suis croisé jadis, comme tous les chevaliers chrétiens, et je ne puis voir un turban sans songer qu’en Palestine, il y a quinze ans, j’ai vu périr par le fer des infidèles mon vieux compagnon d’armes, Olric, le dernier descendant mâle du grand Alfred. Édith, sa fille, qui n’était qu’un enfant alors, et dont il n’avait pas voulu se séparer, tomba au pouvoir des ennemis, et depuis lors j’ignore ce qu’elle est devenue.

Léila
Seigneur, mes compatriotes ne sont pas si cruel qu’on les dépeint ; ils auront pris soin de ses jours ! et, si les prières de ceux que vous avez si généreusement accueillis sont entendues du ciel, vous reverrez l’objet de vos regrets.

Cédric
Je crains bien qu’elles n’aient pas cette influence, aimable enfant ; mais je n’en suis pas moins reconnaissant de tes souhaits. Avant de nous retirer, je veux porter une derniére santé. C’est à vous de me faire raison, sire pèlerin, puisque vous arrivez de la Terre-Sainte ; allons, au plus vaillant des défenseurs de la croix !

Le Pèlerin
(se levant avec enthousiasme)
Au roi Richard !

Cédric
(avec feu)
Qui ? ce Normand qui a entraîné loin de moi mon fils Ivanhoé ! ce ravisseur de l’appui de ma vieillesse ! Étranger, vous avez rouvert dans mon âme une plaie bien profonde !.. Mais Cédric ne doit pas regretter el Saxon qui suit un maître normand... Écartons ces idées : musulman, comment oses-tu venir dans un pays dont les habitans ont tant de motifs de vengeance contre les hommes de ta nation ?

Ismaël
Noble seigneur, que feraient-ils d’un pauvre marchand ? Le commerce est le seul bien que la guerre ne rompt pas entiérement ; je ne possède rien d’ailleurs, et je ne crains que pour ma fille Léila, que votre courtoisie vient de soustraire à la violence de ce terrible Normand.

Le Pèlerin
(vivement)
Que veux-tu dire ? explique toi.

Ismaël
Vous saurez donc, digne pèlerin, et vous, noble seigneur, que nous revenions de la grande place d’armes d’Ashby, où, sur la foi de la trève, j’etais allé pour satisfaire la curiosité de ma fille, et pour y vendre quelques armures que de pauvres chevaliers, morts insolvables, m’avaient laissées en gage. Pendant le tournoi, le chevalier Brian de Boisguilbert avait regardé ma fille avec une attention qui me fit concevoir des craintes que l’événement a trop bien justifiées ; car, à l’entrée du bois qui entoure ce château, nous avons été poursuivis par une troupe d’archers ; et à leur tête, j’ai reconnu Boisguilbert.

Tous
Boisguilbert ! ! !

Ismaël
Boisguilbert, dont la vengeance
Fut toujour l’unique loi.
Boisguilbert, que l’innocence
N’a jamais vu sans effroi !
Ah ! maudite complaisance !
La peste soit du tournoi !

Chœur
Avec son air d’importance
Le poltron se meurt d’effroi.

Ismaël
Dans mon cœur qu’elle tourmente
Son image, encor présente,
Me poursuit et m’épouvante.
Daignez donc, seigneur, écouter
Ce que je vais vous raconter :

L’esprit encor plein de la fête,
Nous cheminions au petit trot,
Lorsque sur nous, le casque en tête,
Le fier Normand fond au galop.

Chaque instant accroît nos alarmes :
Je presse en vain mon coursier :
Ah ! que n’avais-je les armes
Et le cœur d’un chevalier !

Chœur
Qui pourrait craindre les armes
Dans la main d’un tel guerrier ?

Ismaël
Mais, hélas ! pour ma fille
Je davais me conserver.
Près de nous le fer brille ;
Plus d’espoir de nous sauver !

Quand tout-à-coup d’un cloche
Mon oreille entend les sons.
Ô ciel, Boisguilbert approche !
Fuyons, Léila, fuyons !

J’entends sa voix farouche
Retentir dans le bois !
Il nous presse, il nous touche !
Oui, c’est lui, je le vois !

Chœur
Il les presse, il les touche,
Pourront-ils échapper de ce bois ?

Ismaël
Mais soudain la foudre gronde,
Le ciel s’ouvre avec fracas ;
Bientôt une nuit profonde
À leurs yeux cache nos pas.

Déjà plus loin, sur la bruyère
J’entends leurs chevaux galoper.
Enfin, ma fille, j’espère,
Nous pourrons leur échapper.

Du bois nous sortons en silence ;
Ce château se montre à nos yeux ;
Mon cœur renaît à l’espérance,
J’y trouve un appui généreux.

Chœur
Qu’ici sa fureur nous/les assiège,
Je ne crains/il ne craint plus rien désormais,
Le vaillant Cédric nous/les protège,
Et ses rempart sont fort épais.

Cédric
Je ne me repens pas de vous avoir accueillis : on trouvera toujours dans le château de Cédric le Saxon un asile contre les attentats d’un Normand ; mais la prudence exige quelques soins ; car on sait que ce Boisguilbert ne respecte rien. Oswald, qu’on lève le pont ; moi je vais veiller à la sûreté du château ; je reviens à l’istant, pèlerin, ne vous éloignez pas. (Puissions-nous n’avoir que des étrangers à combattre !)

Cédric sort avec ses vassaux ; Léila entre dans la chambre qui lui est indiquée ; Ismaël se dispose à la suivre, lorsqu’il est arrêté par le Pèlerin.




Scène troisième
Le Pèlerin, Ismaël


Le Pèlerin
(à part)
Ismaël, l’argentier du roi de France dans le château de Cédric ! Ne serait-ce point une ruse de Philippe ? Éclaircissons ce doute.
(haute)
Ismaël !

Ismaël
(se retournant)
Qui m’appelle ? Le pèlerin ! Comment sait-il mon nom ?

Le Pèlerin
Est-ce bien la crainte de Boisguilbert qui t’a conduit ici ? Ne cherche pas à m’abuser : tu parles à un homme qui te connaît mieux que tu ne penses.

Ismaël
Seigneur pèlerin, si vous me connaissez, vous devez savoir que je ne suis qu’un pauvre marchand étranger aux débats politiques. Le roi de France, Philippe, auquel j’ai eu l’honneur de rendre de légers services en Palestine, m’a emmené avec lui ; et comme il vient de faire une descente en Angleterre, je suis arrivé à sa suite.

Le Pèlerin
Pour t’enrichir de nos dépouilles ?

Ismaël
Hélas ! sire pèlerin, comment vivre sans un peu d’industrie ? mais plût à Dieu que je fusse aussi riche que mes ennemis le prétendent !

Le Pèlerin
Mécréant, crois-tu m’en imposer ! Ne connais-je pas la grande pierre qui est au pied du palmier de ton jardin de Jérusalem ? Ne sais-je pas que cette pierre cache un escalier qui conduit à un certain caveau ?

Ismaël
Miséricorde ! ce n’est pas un homme, c’est mon mauvais génie !

Le Pèlerin
Comment n’as-tu pas craint de venir demander ici une hospitalité que tu as refusée à des croisés en Palestine ?

Ismaël
Ah ! sire pèlerin, c’est une pure calomnie.

Le Pèlerin
Eh ! quoi, ne te souvient-il plus de ce chevalier blessé que ta fille avait recueilli pendant ton absence, et que tu chassas impitoyablement de chez toi, à ton retour ?

Ismaël
Ah ! ce fut bien malgré moi ; ce chevalier était jeune, fallait-il exposer le cœur de ma fille ?

Le Pèlerin
Rends grâce à sa présence ; c’est à elle seule que tu dois de n’être pas livré à Boisguilbert. Retire-toi ; Cédric va revenir en ces lieux ; il veut me parler sans témoin.

Ismaël
Je sors, seigneur pèlerin ; mais vous me promettez, n’est-ce pas, de me garder le secret du caveau ? je vous assure, d’ailleurs, que j’ai fait, depuis quelque temps, de bien grandes pertes, et qu’il ne contient plus que quelques marchandises. Vous ne parlerez pas non plus du roi Philippe. Si l’on savait que c’est lui qui m’a amené ici...

Le Pèlerin
Je te le promets ; mais souviens-toi que la trève expire demain. Adieu.

Ismaël
Adieu, estimable pèlerin, adieu.
(il sort)



Scène quatrième
Le Pèlerin, seul

Le Pèlerin
C’est elle-même, c’est cette charmante Léila, dont les soins touchans, m’ont rendu à la vie, dans le Terre-Sainte ; la reconnaissance me fait un devoir de la secourir ; mais que dis-je ! je ne dois qu’à ces vêtemens groissiers l’asile que je reçois dans ce château ; j’y rentre en fugitif et sans espoir d’obtenir mon pardon. Quel appui que celui d’un proscrit ! Ah ! du moins j’ai mes armes, ne crains rien de Boisguilbert.

AIR
Blessé sur la terre étrangère,
Si je vois encor la lumiére
Je le dois à ton secours.
Je veux consacrer cette vie,
Qui sans toi m’était ravie,
À veiller sur tes jours.

Mais quel transport naît dans mon âme !
L’innocence de moi réclame
Un appui protecteur.
Je sens, à l’ardeur qui m’enflamme,
Que je dois être ton vengeur.

Je le jure d’avance,
Oui, je veux terminer ta souffrance :
Ce bras saura te protéger ;
Mon cœur s’ouvre à l’espérance,
Il ne connaît plus de danger.



Scène cinquième
Le Pèlerin, Cédric


Cédric
(dans le fond, à part)
Interrogeons cet étranger ; il revient de la Palestine ; peut-être entendrai-je prononcer un nom que je devrais avoir oublié pour toujours.
(s’avançcant et haut)
Digne pèlerin, daignez satisfaire la curiosité d’un vieux guerrier. Vous avez dû être témoin, dans la Terre-Sainte, des hauts faits d’armes des défenseurs de la croix. Quoique Cédric ne soit plus ce qu’il état jadis, un bruit de guerre est toujours plus flatteur à son oreille que les chants joyeux d’un festin.

Le Pèlerin
Seigneur, que vous dirai-je ? Chaque jour voit arriver ici les débris de notre malheureuse armée.

Cédric
Parmi les chevaliers échappés à ce désastre, vous avez connu Brian de Boisguilbert ?

Le Pèlerin
Oui, seigneur, je le vis au tournoi qui eut lieu après la prise de Saint-Jean-d’Acre.

Cédric
Ce fameux tournoi dont la renommée a porté jusqu’ici la nouvelle ! Le fougueux Boisguilbert n’y dut pas rester oisif !

Le Pèlerin
Il y combattit, seigneur, ainsi que deux autres chevaliers normands, qui ne doivent pas vous être inconnus : Albert de Malvoisin...

Cédric
Son ami, le confident de ses pensées...

Le Pèlerin
Et le marquis Lucas de Beaumanoir...

Cédric
Le chef de l’armée rassemblée au château de Saint-Edmond, à quelqes milles d’ici ; vous me cietz de bien fortes lances ! Et quels chevaliers osérent leur tenir tête ?

Le Pèlerin
Leurs vainqueurs.

Cédric
Leurs vainqueurs ! De par saint Dunstan, nommez-moi ces valereux champions, je vous prie.

Le Pèlerin
Le premier en rang, en honneur et en courage, Richard, roi d’Angleterre.

Cédric
Je lui pardonne d’être descendent du tyran Guillaume ; et le second ?

Le Pèlerin
Sire Henry Douglas.

Cédric
Véritable Saxon, par l’âme d’Heingist ; et le troisième, quel était son nom ?

Le Pèlerin
Le troisième, qui avait pour adversaire Boisguilbert, était un jeune chevalier moins renommé, qui fut admis dans cette honorable compagnie plutôt pour aider à l’enterprise.

Cédric
(avec étonnement)
Un jeune chevalier sans réputation, l’antagoniste, le vainqueur de Boisguilbert, du plus vaillant des chevaliers normands, et vous ne vous rappelez pas son nom ? Pèlerin, ce manque de mémoire m’étonne ; pourquoi ce silence subit ? Cette chaîne d’or est à vous si vous me nommez ce jeune héros.

Le Pèlerin
Puisque vous l’exigez, je vous le nommerai sans cette récompense, car j’ai fait vœu de ne point toucher d’or d’ici à un certain temps : ce chevalier était Saxon, et se nommait Wilfrid d’Ivanhoé.

Cédric
Wilfrid ! Ah ! mon cœur me disait que le sang de Cédric ne pouvait degénérer ; mais non, le fils qui m’a désobéi n’est plus mon fils, son destin m’est aussi indifférent que celui du dernier des Normands.




On entend le son du cor.



Scène sixième
Cédric, Le Pèlerin, Léila, Ismaël, Chœur



Léila et Ismaël entrent éperdus.


QUATUOR

Le Pèlerin
Ah ! point d’alarmes,
Séchez vos larmes,
Comptez sur nous.

Léila et Ismaël
Le cor résonne,
Ah ! je frissonne,
Entendez-vous ?

Cédric
De la prudence !
Faisons silence !
Écoutons tous !




Scène septième
Les précédens, un héraut.


Le Héraut
Boisguilbert vous propose ou la guerre ou la paix ;
Cette esclave est la sienne, et ma voix la réclame.
En son pouvoir tous deux remettez-les,
Ou, malgré vos remparts épais,
Craignez le courroux qui l’enflamme.

Le Pèlerin
Va-t’en, dis à ton maître
Qu’un un jeune chevalier
Qu’il apprit à connaître,
Ose le défier ;

Que le fer de ma lance
Saura, sur ces remparts
Punir son insolence
S’il brave mes regards.

Cédric
Quel est donc ce mystère ?
Mon fils est devant moi !

Chœur
Quel étonnant mystère
Dissipe notre effroi ?

Le Pèlerin
Pardonne-moi, mon père ;
En combattant j’espère
Désarmer ta colère
Et sauver son honneur.

Léila
Ô bonheur ! ô destin prospère !
Quel transport agite mon cœur !
Volez à ma défense,
Généreux chevalier !

Chœur
Meure l’indigne chevalier !

Ivanhoé
Je venge son offense ;
Dieu, sois mon bouclier !

Le Chœur et Léila
Le nom seul de la gloire
Fait palpiter mon/son cœur.

Chœur
Aux armes ! victoire !
Suivons ses pas !
Au seul nom de gloire
Il brave le trépas

(Cédric et Ivanhoé sortent avec le Chœur.)




Scène huitième
Ismaël, Léila


Ismaël
Ma fille, où fuir, où nous cacher ? Maudit tournoi ! pourquoi faut-il que j’aie quitté le camp français ?

Léila
Mon père, songez à ce brave chevalier qui s’expose pour vous en ce moment.

Ismaël
Puisse Mahomet étendre sa protection sur lui !

Sur la ritournelle de l’orchestre, les femmes entrent en désordre et précipitamment.

Léila
Quel tumulte ! Ah ! pourquoi ces alarmes ?

Ismaël
Viens, ma fille ; que faire sans armes ?

Léila
Ah ! de grâce, parlez ! voyez mes larmes !

Ismaël
Elle reste, je meurs de frayeur.

Léila
Mon cœur tremble ; sinistre présage !

Ismaël
Mon cœur tremble ; adieu, mon courage !

Chœur
Malheureuse ! le combat s’engage
Ta présence excite leur rage.
Suis ton père, évite leur outrage,
Et détourne de nous leur fureur.

Léila
(se dégageant des bras de son père, qui l’entraîne en fuyant)
Mon père, mon père ! que vois-je ? il est blessé !




Scène neuvième
Léila, Ivanhoé, blessé, soutenu par deux soldats qui se retirent.


Ivanhoé
Que faites-vous ici, Léila ? Fuyez votre ravisseur, je ne puis vous défendre.

Léila
(s’approchant de lui)
Vous abandonner en cet état, quand c’est pour moi que vous êtes exposé à la mort ! Laissez-moi panser votre blessure, peutêtre parviendrai-je à vous soulager.

Ivanhoé
Faut-il que sois hors de combat ! Si, du moins, je pouvais lever une hache d’armes, ne fût-ce que pour en frapper un seul coup ! Vœux superflus, je suis sans forces ; aidez-moi, je vous prie, à me traîner près de cette fenêtre, que je sois témoin...

Léila
Restez, chevalier, vous agraveriez votre blessure ; elle n’est pas dangereuse, vous serez bientôt rétabli ; mais le repos est nécessaire. Je vais m’y placer moi-même, et je vous rendrai compte de tout ce qui passera au dehors.

Ivanhoé
Je vous le défends, chaque ouverture va servir de point de mire aux archer. Léila, voudriez vous que j’eusse à me reprocher votre mort, que ce souvenir empoisonnât le reste de ma vie ? Du moins, couvrez-vous de cet ancien bouclier, et montrez-vous le moins possible.

Léila
(se couvrant du bouclier)
Ô spettacle horrible !

Ivanhoé
J’entends d’ici le bruit des armes, et il faut que je reste oisif ! Regardez les assiégeans, avancent-ils toujours ?

Léila
Je ne vois qu’une nuée de flèches ; mes yeux en sont éblouis. Ô ciel !

Ivanhoé
Parlez.

Léila
Nos défenseurs sont repoussés, le château est pris, je vois Boisguilbert sur les remparts.

Ivanhoé
Et que font donc nos vassaux ?

Léila
Tout est perdu, ils fuient.


FINAL

Léila
Hélas ! ô douleur !
Ô jour funeste !

Ivanhoé
(saissiant une épée)
Ce fer me reste.

Chœur
(en dehors)
Victoire ! honneur !
Il est vainqueur !

Léila
Moment terrible !
Quel trouble horrible
S’empare de mon cœur !

Ivanhoé
Aux tourmens que mon âme endure
Je préfère la mort.

Léila
Arrêtez ! je vous en conjure ;
Le crime est le plus fort.
Il n’est plus d’espérance.
Ah ! craignez leur vengeance,
Ou vous allez périr.

Ivanhoé
Je brave leur vengeance,
Je n’ai qu’une espérance :
Vous sauver, ou mourir.

Chœur
Craignez notre vengeance,
Oui, vous allez périr.



Scène dixième
Ivanhoé, Léila, Ismaël, soldats et plus tard Boisguilbert


Léila
Ô sort infidèle,
Tu tromps mon zèle ;
Ta rage cruelle
Accable mon cœur !
Ô crainte ! ô douleur !

Ismaël
Ô rage ! ô douleur !
Je me meurs de peur !

Léila
Mon père, craignez sa colère.
(a Ivanhoé)
Seigneur, ne m’abbandonnez pas.

Ivanhoé
Ô ciel ! je frémis de colère.
À sa voix n’obéissez pas.

Ismaël
Ma fille, évitons sa colère.
(a Ivanhoé)
Seigneur, ne m’abbandonnez pas.

Boisguilbert et Chœur
Tremblez, jeune téméraire ;
(a Léila)
Marchez, suivez nos pas.

Léila
Ô mon père, quelle souffrance !

Boisguilbert
Ne faites plus de résistance,
Ou craignez le trépas.

Léila
Ah ! plutôt que je périsse !

Boisguilbert
Allons, soldats, qu’on la saisisse !

Ivanhoé
Faut-il que le sort me trahisse,
Et qu’il enchaîne ainsi mon bras !

Ivanhoé, Léila et Ismaël
Dieu, comble mon attente !
Crains de ma/sa main pesante
La vengeance éclatante,
Indigne chevalier !

Boisguilbert
Cette victoire éclatante
Couronne mon attente ;
Dans ta rage impuissante
Tu peux me défier.

Chœur
Cette victoire éclatante
Surpasse notre attente :
Dans ta rage impuissante
Tu peux nous défier.

(Boisguilbert et les soldates se retirent et entraînent Léila.)

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© DRG, 18. März 2001