Acte premier
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Le théâtre représente une salle gothique ; des instrumens de guerre et de chasse sont suspendus aux murs.
On voit, dans le fond, une large fenêtre, et, à gauche, une vaste cheminée. Au lever de la toile, on entend gronder un orage.
- Cédric et Chur
Saxons, la coupe en main
Au succès de nos armes !
Peut-être les alarmes
Vont renaître demain.
- On frappe à la porte de la salle
- Léila et Ismaël
Seigneur, dans votre demeure
Par pitié recevez-nous.
- Chur
Loin dici partez sur lheure,
Ou craignez notre courroux.
- Le Pèlerin
(à Léila)
Vite, vite, à cette place,
Sans bruit venez vous asseoir.
- Léila
Ah ! seigneur, je vous rends grâce ;
Mon cur renaît à lespoir.
- Chur
Un musulman ! quelle audace !
Renonce à ce fol espoir.
- Le Pèlerin
Méprisez leur insolence,
Je saurai vous protéger.
- Léila
Sur notre reconnaissance
Comptez, ô digne étranger.
- Le Pèlerin
Oui, malheur à qui menace
Linnocence et la beauté !
- Léila
Quoi ! prés de vous prendre place !
Pèlerin, quelle bonté !
Ils sont à notre poursuite.
- Ismaël
Sauvez-nous de leur fureur !
- Chur
Loin dici, race maudite !
Un musulman ! Quelle horreur !
- Léila
Point de colère,
De mon vieux père,
À ma prière,
Calmez leffroi.
- Ismaël
Point de colère,
Ah ! dun vieux père,
À sa prière,
Plaignez leffroi.
- Chur
Vaine prière !
Vil temeraire
Crains ma colère,
Retire-toi.
- Cédric
Non, sa priére
Ne peut déplaire ;
De son vieux père,
Je plains leffroi.
- Le Pèlerin
Votre prière
Ne peut déplaire ;
Cédric est père ;
Ah ! point deffroi.
- Léila et Ismaël
Excusez notre audace,
Seigneur, sauvez, de grâce,
Des fureurs dun méchant
Un père et son enfant.
- Chur
Vaine prière !
Vil temeraire
Crains ma colère,
Retire-toi.
- Cédric
Paix ! Mes dignes hôtes, lorsque la guerre est à nos portes, ne refusons lhospitalité à personne. La trève conclue entre lAngleterre et le roi de France, Philippe, expire demain ; et qui sait si alors nous aurons encore un asile ? Que ce musulman reste avec so fille, quoique sa présence éveille en mon âme des souvenirs douloureux... Je me suis croisé jadis, comme tous les chevaliers chrétiens, et je ne puis voir un turban sans songer quen Palestine, il y a quinze ans, jai vu périr par le fer des infidèles mon vieux compagnon darmes, Olric, le dernier descendant mâle du grand Alfred. Édith, sa fille, qui nétait quun enfant alors, et dont il navait pas voulu se séparer, tomba au pouvoir des ennemis, et depuis lors jignore ce quelle est devenue.
- Léila
Seigneur, mes compatriotes ne sont pas si cruel quon les dépeint ; ils auront pris soin de ses jours ! et, si les prières de ceux que vous avez si généreusement accueillis sont entendues du ciel, vous reverrez lobjet de vos regrets.
- Cédric
Je crains bien quelles naient pas cette influence, aimable enfant ; mais je nen suis pas moins reconnaissant de tes souhaits. Avant de nous retirer, je veux porter une derniére santé. Cest à vous de me faire raison, sire pèlerin, puisque vous arrivez de la Terre-Sainte ; allons, au plus vaillant des défenseurs de la croix !
- Le Pèlerin
(se levant avec enthousiasme)
Au roi Richard !
- Cédric
(avec feu)
Qui ? ce Normand qui a entraîné loin de moi mon fils Ivanhoé ! ce ravisseur de lappui de ma vieillesse ! Étranger, vous avez rouvert dans mon âme une plaie bien profonde !.. Mais Cédric ne doit pas regretter el Saxon qui suit un maître normand... Écartons ces idées : musulman, comment oses-tu venir dans un pays dont les habitans ont tant de motifs de vengeance contre les hommes de ta nation ?
- Ismaël
Noble seigneur, que feraient-ils dun pauvre marchand ? Le commerce est le seul bien que la guerre ne rompt pas entiérement ; je ne possède rien dailleurs, et je ne crains que pour ma fille Léila, que votre courtoisie vient de soustraire à la violence de ce terrible Normand.
- Le Pèlerin
(vivement)
Que veux-tu dire ? explique toi.
- Ismaël
Vous saurez donc, digne pèlerin, et vous, noble seigneur, que nous revenions de la grande place darmes dAshby, où, sur la foi de la trève, jetais allé pour satisfaire la curiosité de ma fille, et pour y vendre quelques armures que de pauvres chevaliers, morts insolvables, mavaient laissées en gage. Pendant le tournoi, le chevalier Brian de Boisguilbert avait regardé ma fille avec une attention qui me fit concevoir des craintes que lévénement a trop bien justifiées ; car, à lentrée du bois qui entoure ce château, nous avons été poursuivis par une troupe darchers ; et à leur tête, jai reconnu Boisguilbert.
- Tous
Boisguilbert ! ! !
- Ismaël
Boisguilbert, dont la vengeance
Fut toujour lunique loi.
Boisguilbert, que linnocence
Na jamais vu sans effroi !
Ah ! maudite complaisance !
La peste soit du tournoi !
- Chur
Avec son air dimportance
Le poltron se meurt deffroi.
- Ismaël
Dans mon cur quelle tourmente
Son image, encor présente,
Me poursuit et mépouvante.
Daignez donc, seigneur, écouter
Ce que je vais vous raconter :
- Lesprit encor plein de la fête,
Nous cheminions au petit trot,
Lorsque sur nous, le casque en tête,
Le fier Normand fond au galop.
- Chaque instant accroît nos alarmes :
Je presse en vain mon coursier :
Ah ! que navais-je les armes
Et le cur dun chevalier !
- Chur
Qui pourrait craindre les armes
Dans la main dun tel guerrier ?
- Ismaël
Mais, hélas ! pour ma fille
Je davais me conserver.
Près de nous le fer brille ;
Plus despoir de nous sauver !
- Quand tout-à-coup dun cloche
Mon oreille entend les sons.
Ô ciel, Boisguilbert approche !
Fuyons, Léila, fuyons !
- Jentends sa voix farouche
Retentir dans le bois !
Il nous presse, il nous touche !
Oui, cest lui, je le vois !
- Chur
Il les presse, il les touche,
Pourront-ils échapper de ce bois ?
- Ismaël
Mais soudain la foudre gronde,
Le ciel souvre avec fracas ;
Bientôt une nuit profonde
À leurs yeux cache nos pas.
- Déjà plus loin, sur la bruyère
Jentends leurs chevaux galoper.
Enfin, ma fille, jespère,
Nous pourrons leur échapper.
- Du bois nous sortons en silence ;
Ce château se montre à nos yeux ;
Mon cur renaît à lespérance,
Jy trouve un appui généreux.
- Chur
Quici sa fureur nous/les assiège,
Je ne crains/il ne craint plus rien désormais,
Le vaillant Cédric nous/les protège,
Et ses rempart sont fort épais.
- Cédric
Je ne me repens pas de vous avoir accueillis : on trouvera toujours dans le château de Cédric le Saxon un asile contre les attentats dun Normand ; mais la prudence exige quelques soins ; car on sait que ce Boisguilbert ne respecte rien. Oswald, quon lève le pont ; moi je vais veiller à la sûreté du château ; je reviens à listant, pèlerin, ne vous éloignez pas. (Puissions-nous navoir que des étrangers à combattre !)
- Cédric sort avec ses vassaux ; Léila entre dans la chambre qui lui est indiquée ; Ismaël se dispose à la suivre, lorsquil est arrêté par le Pèlerin.
- Le Pèlerin
(à part)
Ismaël, largentier du roi de France dans le château de Cédric ! Ne serait-ce point une ruse de Philippe ? Éclaircissons ce doute.
(haute)
Ismaël !
- Ismaël
(se retournant)
Qui mappelle ? Le pèlerin ! Comment sait-il mon nom ?
- Le Pèlerin
Est-ce bien la crainte de Boisguilbert qui ta conduit ici ? Ne cherche pas à mabuser : tu parles à un homme qui te connaît mieux que tu ne penses.
- Ismaël
Seigneur pèlerin, si vous me connaissez, vous devez savoir que je ne suis quun pauvre marchand étranger aux débats politiques. Le roi de France, Philippe, auquel jai eu lhonneur de rendre de légers services en Palestine, ma emmené avec lui ; et comme il vient de faire une descente en Angleterre, je suis arrivé à sa suite.
- Le Pèlerin
Pour tenrichir de nos dépouilles ?
- Ismaël
Hélas ! sire pèlerin, comment vivre sans un peu dindustrie ? mais plût à Dieu que je fusse aussi riche que mes ennemis le prétendent !
- Le Pèlerin
Mécréant, crois-tu men imposer ! Ne connais-je pas la grande pierre qui est au pied du palmier de ton jardin de Jérusalem ? Ne sais-je pas que cette pierre cache un escalier qui conduit à un certain caveau ?
- Ismaël
Miséricorde ! ce nest pas un homme, cest mon mauvais génie !
- Le Pèlerin
Comment nas-tu pas craint de venir demander ici une hospitalité que tu as refusée à des croisés en Palestine ?
- Ismaël
Ah ! sire pèlerin, cest une pure calomnie.
- Le Pèlerin
Eh ! quoi, ne te souvient-il plus de ce chevalier blessé que ta fille avait recueilli pendant ton absence, et que tu chassas impitoyablement de chez toi, à ton retour ?
- Ismaël
Ah ! ce fut bien malgré moi ; ce chevalier était jeune, fallait-il exposer le cur de ma fille ?
- Le Pèlerin
Rends grâce à sa présence ; cest à elle seule que tu dois de nêtre pas livré à Boisguilbert. Retire-toi ; Cédric va revenir en ces lieux ; il veut me parler sans témoin.
- Ismaël
Je sors, seigneur pèlerin ; mais vous me promettez, nest-ce pas, de me garder le secret du caveau ? je vous assure, dailleurs, que jai fait, depuis quelque temps, de bien grandes pertes, et quil ne contient plus que quelques marchandises. Vous ne parlerez pas non plus du roi Philippe. Si lon savait que cest lui qui ma amené ici...
- Le Pèlerin
Je te le promets ; mais souviens-toi que la trève expire demain. Adieu.
- Ismaël
Adieu, estimable pèlerin, adieu.
(il sort)
- Le Pèlerin
Cest elle-même, cest cette charmante Léila, dont les soins touchans, mont rendu à la vie, dans le Terre-Sainte ; la reconnaissance me fait un devoir de la secourir ; mais que dis-je ! je ne dois quà ces vêtemens groissiers lasile que je reçois dans ce château ; jy rentre en fugitif et sans espoir dobtenir mon pardon. Quel appui que celui dun proscrit ! Ah ! du moins jai mes armes, ne crains rien de Boisguilbert.
- AIR
Blessé sur la terre étrangère,
Si je vois encor la lumiére
Je le dois à ton secours.
Je veux consacrer cette vie,
Qui sans toi métait ravie,
À veiller sur tes jours.
- Mais quel transport naît dans mon âme !
Linnocence de moi réclame
Un appui protecteur.
Je sens, à lardeur qui menflamme,
Que je dois être ton vengeur.
- Je le jure davance,
Oui, je veux terminer ta souffrance :
Ce bras saura te protéger ;
Mon cur souvre à lespérance,
Il ne connaît plus de danger.
- Cédric
(dans le fond, à part)
Interrogeons cet étranger ; il revient de la Palestine ; peut-être entendrai-je prononcer un nom que je devrais avoir oublié pour toujours.
(savançcant et haut)
Digne pèlerin, daignez satisfaire la curiosité dun vieux guerrier. Vous avez dû être témoin, dans la Terre-Sainte, des hauts faits darmes des défenseurs de la croix. Quoique Cédric ne soit plus ce quil état jadis, un bruit de guerre est toujours plus flatteur à son oreille que les chants joyeux dun festin.
- Le Pèlerin
Seigneur, que vous dirai-je ? Chaque jour voit arriver ici les débris de notre malheureuse armée.
- Cédric
Parmi les chevaliers échappés à ce désastre, vous avez connu Brian de Boisguilbert ?
- Le Pèlerin
Oui, seigneur, je le vis au tournoi qui eut lieu après la prise de Saint-Jean-dAcre.
- Cédric
Ce fameux tournoi dont la renommée a porté jusquici la nouvelle ! Le fougueux Boisguilbert ny dut pas rester oisif !
- Le Pèlerin
Il y combattit, seigneur, ainsi que deux autres chevaliers normands, qui ne doivent pas vous être inconnus : Albert de Malvoisin...
- Cédric
Son ami, le confident de ses pensées...
- Le Pèlerin
Et le marquis Lucas de Beaumanoir...
- Cédric
Le chef de larmée rassemblée au château de Saint-Edmond, à quelqes milles dici ; vous me cietz de bien fortes lances ! Et quels chevaliers osérent leur tenir tête ?
- Le Pèlerin
Leurs vainqueurs.
- Cédric
Leurs vainqueurs ! De par saint Dunstan, nommez-moi ces valereux champions, je vous prie.
- Le Pèlerin
Le premier en rang, en honneur et en courage, Richard, roi dAngleterre.
- Cédric
Je lui pardonne dêtre descendent du tyran Guillaume ; et le second ?
- Le Pèlerin
Sire Henry Douglas.
- Cédric
Véritable Saxon, par lâme dHeingist ; et le troisième, quel était son nom ?
- Le Pèlerin
Le troisième, qui avait pour adversaire Boisguilbert, était un jeune chevalier moins renommé, qui fut admis dans cette honorable compagnie plutôt pour aider à lenterprise.
- Cédric
(avec étonnement)
Un jeune chevalier sans réputation, lantagoniste, le vainqueur de Boisguilbert, du plus vaillant des chevaliers normands, et vous ne vous rappelez pas son nom ? Pèlerin, ce manque de mémoire métonne ; pourquoi ce silence subit ? Cette chaîne dor est à vous si vous me nommez ce jeune héros.
- Le Pèlerin
Puisque vous lexigez, je vous le nommerai sans cette récompense, car jai fait vu de ne point toucher dor dici à un certain temps : ce chevalier était Saxon, et se nommait Wilfrid dIvanhoé.
- Cédric
Wilfrid ! Ah ! mon cur me disait que le sang de Cédric ne pouvait degénérer ; mais non, le fils qui ma désobéi nest plus mon fils, son destin mest aussi indifférent que celui du dernier des Normands.
On entend le son du cor.
- Léila et Ismaël entrent éperdus.
QUATUOR
- Le Pèlerin
Ah ! point dalarmes,
Séchez vos larmes,
Comptez sur nous.
- Léila et Ismaël
Le cor résonne,
Ah ! je frissonne,
Entendez-vous ?
- Cédric
De la prudence !
Faisons silence !
Écoutons tous !
- Le Héraut
Boisguilbert vous propose ou la guerre ou la paix ;
Cette esclave est la sienne, et ma voix la réclame.
En son pouvoir tous deux remettez-les,
Ou, malgré vos remparts épais,
Craignez le courroux qui lenflamme.
- Le Pèlerin
Va-ten, dis à ton maître
Quun un jeune chevalier
Quil apprit à connaître,
Ose le défier ;
- Que le fer de ma lance
Saura, sur ces remparts
Punir son insolence
Sil brave mes regards.
- Cédric
Quel est donc ce mystère ?
Mon fils est devant moi !
- Chur
Quel étonnant mystère
Dissipe notre effroi ?
- Le Pèlerin
Pardonne-moi, mon père ;
En combattant jespère
Désarmer ta colère
Et sauver son honneur.
- Léila
Ô bonheur ! ô destin prospère !
Quel transport agite mon cur !
Volez à ma défense,
Généreux chevalier !
- Chur
Meure lindigne chevalier !
- Ivanhoé
Je venge son offense ;
Dieu, sois mon bouclier !
- Le Chur et Léila
Le nom seul de la gloire
Fait palpiter mon/son cur.
- Chur
Aux armes ! victoire !
Suivons ses pas !
Au seul nom de gloire
Il brave le trépas
- (Cédric et Ivanhoé sortent avec le Chur.)
- Ismaël
Ma fille, où fuir, où nous cacher ? Maudit tournoi ! pourquoi faut-il que jaie quitté le camp français ?
- Léila
Mon père, songez à ce brave chevalier qui sexpose pour vous en ce moment.
- Ismaël
Puisse Mahomet étendre sa protection sur lui !
- Sur la ritournelle de lorchestre, les femmes entrent en désordre et précipitamment.
- Léila
Quel tumulte ! Ah ! pourquoi ces alarmes ?
- Ismaël
Viens, ma fille ; que faire sans armes ?
- Léila
Ah ! de grâce, parlez ! voyez mes larmes !
- Ismaël
Elle reste, je meurs de frayeur.
- Léila
Mon cur tremble ; sinistre présage !
- Ismaël
Mon cur tremble ; adieu, mon courage !
- Chur
Malheureuse ! le combat sengage
Ta présence excite leur rage.
Suis ton père, évite leur outrage,
Et détourne de nous leur fureur.
- Léila
(se dégageant des bras de son père, qui lentraîne en fuyant)
Mon père, mon père ! que vois-je ? il est blessé !
- Ivanhoé
Que faites-vous ici, Léila ? Fuyez votre ravisseur, je ne puis vous défendre.
- Léila
(sapprochant de lui)
Vous abandonner en cet état, quand cest pour moi que vous êtes exposé à la mort ! Laissez-moi panser votre blessure, peutêtre parviendrai-je à vous soulager.
- Ivanhoé
Faut-il que sois hors de combat ! Si, du moins, je pouvais lever une hache darmes, ne fût-ce que pour en frapper un seul coup ! Vux superflus, je suis sans forces ; aidez-moi, je vous prie, à me traîner près de cette fenêtre, que je sois témoin...
- Léila
Restez, chevalier, vous agraveriez votre blessure ; elle nest pas dangereuse, vous serez bientôt rétabli ; mais le repos est nécessaire. Je vais my placer moi-même, et je vous rendrai compte de tout ce qui passera au dehors.
- Ivanhoé
Je vous le défends, chaque ouverture va servir de point de mire aux archer. Léila, voudriez vous que jeusse à me reprocher votre mort, que ce souvenir empoisonnât le reste de ma vie ? Du moins, couvrez-vous de cet ancien bouclier, et montrez-vous le moins possible.
- Léila
(se couvrant du bouclier)
Ô spettacle horrible !
- Ivanhoé
Jentends dici le bruit des armes, et il faut que je reste oisif ! Regardez les assiégeans, avancent-ils toujours ?
- Léila
Je ne vois quune nuée de flèches ; mes yeux en sont éblouis. Ô ciel !
- Ivanhoé
Parlez.
- Léila
Nos défenseurs sont repoussés, le château est pris, je vois Boisguilbert sur les remparts.
- Ivanhoé
Et que font donc nos vassaux ?
- Léila
Tout est perdu, ils fuient.
FINAL
- Léila
Hélas ! ô douleur !
Ô jour funeste !
- Ivanhoé
(saissiant une épée)
Ce fer me reste.
- Chur
(en dehors)
Victoire ! honneur !
Il est vainqueur !
- Léila
Moment terrible !
Quel trouble horrible
Sempare de mon cur !
- Ivanhoé
Aux tourmens que mon âme endure
Je préfère la mort.
- Léila
Arrêtez ! je vous en conjure ;
Le crime est le plus fort.
Il nest plus despérance.
Ah ! craignez leur vengeance,
Ou vous allez périr.
- Ivanhoé
Je brave leur vengeance,
Je nai quune espérance :
Vous sauver, ou mourir.
- Chur
Craignez notre vengeance,
Oui, vous allez périr.
- Léila
Ô sort infidèle,
Tu tromps mon zèle ;
Ta rage cruelle
Accable mon cur !
Ô crainte ! ô douleur !
- Ismaël
Ô rage ! ô douleur !
Je me meurs de peur !
- Léila
Mon père, craignez sa colère.
(a Ivanhoé)
Seigneur, ne mabbandonnez pas.
- Ivanhoé
Ô ciel ! je frémis de colère.
À sa voix nobéissez pas.
- Ismaël
Ma fille, évitons sa colère.
(a Ivanhoé)
Seigneur, ne mabbandonnez pas.
- Boisguilbert et Chur
Tremblez, jeune téméraire ;
(a Léila)
Marchez, suivez nos pas.
- Léila
Ô mon père, quelle souffrance !
- Boisguilbert
Ne faites plus de résistance,
Ou craignez le trépas.
- Léila
Ah ! plutôt que je périsse !
- Boisguilbert
Allons, soldats, quon la saisisse !
- Ivanhoé
Faut-il que le sort me trahisse,
Et quil enchaîne ainsi mon bras !
- Ivanhoé, Léila et Ismaël
Dieu, comble mon attente !
Crains de ma/sa main pesante
La vengeance éclatante,
Indigne chevalier !
- Boisguilbert
Cette victoire éclatante
Couronne mon attente ;
Dans ta rage impuissante
Tu peux me défier.
- Chur
Cette victoire éclatante
Surpasse notre attente :
Dans ta rage impuissante
Tu peux nous défier.
- (Boisguilbert et les soldates se retirent et entraînent Léila.)